Publications by Year: 2011

Conference Paper
Efthymiou L. Histoire d'une cohabitation, histoire d'une collaboration: les personnels grec et français du Département de Langue et Littérature françaises de l'Université d'Athènes (1954-1991). In: Actes du 7e Congrès Panhellénique et International des Professeurs de Français: Communiquer, échanger, collaborer en français dans l'espace méditerranéen et balkanique . Collectif. Athènes: Université nationale et capodistrienne d'Athènes; 2011. pp. 215-226. Publisher's VersionAbstract
Ce travail se penche sur un aspect de la coopération franco-hellénique dans le domaine de la formation au professorat de français. Elle porte plus précisément sur la période 1954-1991 et étudie la mise sur pied à l’université d’Athènes d’une structure de préparation professionnelle destinée aux francisants. La France participe à cette entreprise avec une équipe enseignante composée de docteurs d’État, d’agrégés et de licenciés. L’étude examine le cadre de cohabitation, au sein de la Section française d’abord, du Département de langue et littérature françaises plus tard, de deux personnels, français et grec, qui tout en ayant un but commun, devaient, en même temps, servir les politiques culturelles/éducatives de leur pays respectif. Elle constitue un premier bilan des résultats d’une recherche en cours.Dans la première partie qui couvre la période 1954-1976, est évoqué, en premier lieu, le contexte géopolitique en pleine reconstruction qui émerge après la Seconde Guerre mondiale et qui conduit à une redistribution des zones d’influence entre les grandes puissances occidentales dans le domaine linguistique et culturel. Ces mutations entraînent, d’une part, la perte des privilèges français dans ce domaine et, d’autre part, une reformulation des stratégies universitaires concernant la formation des professeurs de langues étrangères ; celles-ci se concrétisent par la création de sections universitaires de préparation à cette spécialité. Suit l’examen des textes législatifs constitutifs de la Section française qui révèle les choix stratégiques qui ont prévalu et la philosophie qui a présidé lors de leur élaboration : former des fonctionnaires hellènes imbus d’une culture gréco-française ; placer cette structure sous la haute surveillance des autorités universitaires. L’analyse s’intéresse plus particulièrement au partenariat entre les deux équipes, française et grecque, inauguré par la loi de 1954. Cette collaboration n’était pas conçue sur un pied d’égalité : la loi réservait un rôle subordonné à la partie française. Il n’empêche que la responsabilité administrative de la Section (gestion économique et coordination des auxiliaires d’enseignement) était assumée par l’un des deux titulaires français des chaires créées. Une première approche du profil de l’équipe française, groupe de fonctionnaires migrants, est tentée dans un deuxième temps : composition sexuée, titres, durée des missions, difficultés de recrutement. Cette première partie se termine par une brève étude du groupe quasi-féminin de maîtres-assistant.e.s grec.que.s constitué à partir de 1964 pour faire face à l’augmentation vertigineuse de la population étudiante. La deuxième partie du travail qui examine la période 1976-1991 met en relief le processus de désengagement de la partie française de la direction de la Section. Cette rupture est le résultat de la réorientation des politiques culturelles françaises dans le domaine de l’enseignement à l’étranger. De leur côté, les professeurs grecs mettent en place les structures adéquates qui permettront l’affranchissement des sections universitaires de langues vivantes de la tutelle étrangère : création de chaires, recrutement d’un personnel grec plus nombreux et mieux instruit. Ces stratégies conduisent inévitablement à l’hellénisation et à la féminisation des structures de formation en question. En 1991, prend fin la mission du dernier lecteur français à la Section française athénienne et avec elle la collaboration franco-hellénique dans ce domaine.
Journal Article
Efthymiou L. Simone Weil vs Université : aspects inédits de l'histoire d'une professeure rebelle (1931-1940). Επιστημονική Επετηρίδα της Φιλοσοφικής Σχολής του Πανεπιστημίου Αθηνών . 2011;ΜΑ:279-295.Abstract
Par le biais de l’étude du cas de la professeure de philosophie Simone Weil (1931-1940), cet article s’intéresse à faire émerger un aspect du versant féminin de la transgression des normes au sein de l’Université de l’entre-deux-guerres. Il prend appui sur le point de vue des autorités universitaires tel qu’il se dessine surtout à travers la lecture des documents conservés dans le dossier de carrière de la fonctionnaire. Le présent travail tente aussi d’interpréter, sous un éclairage différent, les faits relatés par ses biographes.L’analyse prend tout d’abord en considération le double registre de la langue utilisée par l’administration : discrétion dans notices annuelles, libération du langage dans la correspondance. La deuxième partie du travail enregistre les griefs les plus graves formulés contre la philosophe. L'administration fustige, en premier lieu, les rapports que Weil entretient avec ses collègues et sa conduite irrespectueuse à l’égard de sa directrice. On lui reproche en outre de ne pas respecter les programmes officiels et de transformer sa chaire en tribune où elle défend ses idées politiques et sociales : elle viole ainsi le principe de neutralité scolaire. La troisième partie de l’étude nous entraîne sur le terrain des activités militantes de la professeure. Les rapports de police, la correspondance de ses chefs administratifs, des articles de presse, enfin, se réfèrent surtout à sa participation aux grèves ouvrières organisées à la ville du Puy. L’examen du discours déployé dans ces documents révèle que le sexe de la militante gêne davantage que sa fonction : Weil provoque en premier lieu parce qu’elle est femme, donc non citoyenne, et ensuite parce qu’elle est professeure de l’enseignement public.Dans la dernière partie sont mis en évidence les « silences » du dossier de Weil après 1933, ce qui laisse supposer qu’il fut systématiquement dépouillé après cette date. Malgré les vides dans la documentation, les documents repérés laissent percevoir clairement le point de vue de l’administration au sujet de la place de Simone Weil dans l’Université : celle-ci est, à tout moment, présentée comme une intruse, comme une déplacée, une « indésirable ».
Book Chapter
Efthymiou L. Genre, discours et engagement chez Elsa Triolet. In: L'identité féminine dans l'œuvre d'Elsa Triolet. Thomas Stauder . Tübingen: Éditions Lendemains; 2011. pp. 223-235. Publisher's VersionAbstract
Cette contribution au volume consacré à l’identité féminine dans l’oeuvre d’Elsa Triolet tente de décrypter la pensée « féministe » de l’auteure à travers ses écrits personnels et autobiographiques, ses articles et reportages, les discours également prononcés dans le cadre des manifestations organisées par l’Union des Femmes Françaises. Dans une première partie sont examinées ses conceptions sur les rapports des sexes. Triolet réfute haut et fort la supériorité des hommes sur les femmes et condamne la ségrégation des sexes. Selon l’auteure l’être humain n’est pas fait que de « féminin » ou que de « masculin ». La société devrait être donc construite à l’image de cet être mixte : elle prône alors un univers bisexué, un langage aussi dans lequel les deux sexes seraient visibles. Pour y arriver, elle invite à un « féminisme individuel », un féminisme quotidien. C’est qu’elle rejette l’idée de la mobilisation collective des femmes : à son sens, cette forme de lutte représente une autre manifestation du « ghetto » qu’elle abhorre. Fidèle à ces convictions, elle choisit de promouvoir des causes qui s’inscrivent dans le cadre plus large de l’action des intellectuelles de gauche proches du PCF. Dans la deuxième partie, il est question de son engagement dans la Résistance. Au cours de cette période de sa vie, Triolet se soumet en apparence à la répartition sexuée des rôles. Le « je » féminin recouvre ses droits dans ses seuls écrits portant sur cette période : moment transitionnel, la guerre bouleverse les équilibres et les assignations, brouille les identités. Ces textes participent ainsi à la construction d’une mémoire communiste de la Résistance au féminin. La troisième partie est consacrée au combat de Triolet, compagnon de route du PCF, contre l’invasion d’une culture américaine en France. En pleine guerre froide, l’auteure ne dissocie pas la lutte en faveur d’une littérature « progressiste » de celle pour la paix : les femmes pourraient contribuer à la propagation de cette culture, seule arme contre la guerre. Fidèle à la ligne du Parti, elle ne cesse de valoriser - quand l’Union des Femmes Françaises fait appel à elle – cet aspect du rôle social féminin. Pour expliquer la propension des hommes à la guerre, elle a recours au schéma nature/culture : elle considère que seule la paix est conforme à la nature des deux sexes, le bellicisme étant ainsi présenté comme une construction sociale ; or, la nature masculine n’est pas perméable au conditionnement social, d’où la supériorité naturelle des femmes dont la présence dans la sphère publique constitue, de ce fait, une condition indispensable au progrès humain.L’errance à travers les textes d’Elsa Triolet conduit donc à la constatation que sa pensée « féministe » se forme sous le signe de la contradiction due aussi à son appartenance politique : adhésion à un féminisme de l’égalité dans son discours introspectif mais, dans la sphère publique, promotion du différentialisme sexuel ; lutte individuelle pour l’égalité avec les hommes et, parallèlement, rejet d’une action féministe collective au nom d’une société mixte et égalitaire.